Jeudi 17 novembre s’est tenu le Premier Forum de la transition économique, écologique et sociale organisé par la ville de Grande-Synthe et la Communauté urbaine de Dunkerque. Ce forum, conçu comme un espace ouvert de dialogue, de rencontres et d’échanges, a pour objectif d’anticiper les mutations économiques, technologiques et sociétales pour penser le territoire de demain.
Pour Damien Carême, Maire de Grande-Synthe, les crises que traverse actuellement le territoire (climatiques, migratoires, démocratiques…) font émerger la nécessité d’inventer un nouveau modèle. L’agglomération de Dunkerque, née autour de l’industrie, doit aujourd’hui anticiper la transformation du secteur industriel afin d’être résiliente. Patrice Vergriete, président de la CUD (Communauté Urbaine de Dunkerque), a également souligné que les deux points forts de l’industrie de l’agglomération, l’automobile et l’énergie, sont deux secteurs qui vont connaître des changements majeurs dans les années à venir.
La journée s’est structurée en deux plénières et deux tables-rondes, durant lesquels des acteurs du territoire ou des experts d’ailleurs ont pu exprimer leur point de vue, leurs attentes, leurs travaux sur la transition.
#1 Plénière : Comprendre les limites de notre modèle de développement et identifier les germes du changement pour construire le modèle de demain. Mais, vers quels futurs souhaitables ou souhaités ?
Jean-François Vereecke, économiste de l’AGUR, agence d’urbanisme Flandre-Dunkerque, a présenté les atouts et fragilités du territoire à travers la Toile industrielle du dunkerquois, un outil de compréhension de l’économie locale représentant des flux interentreprises dans le bassin d’emploi de Dunkerque. La synthèse de cette Toile : Dunkerque, c’est un port, un pilier énergétique avec des énergies de stocks, de la sidérurgie, une présence importante de l’automobile, mais aussi des filières agricoles. La Toile industrielle, destinée aux investisseurs, au service public et aux experts, est consultable ici.
Stéphane Juguet, Anthropologue de l’agence WT2I, a présenté la démarche de prospective participative d’un nouveau genre engagée à Grande-Synthe, à la demande de la ville ainsi que de l’ADEME. Utilisant la méthode POP (Populaire, Optimiste et Participative), Stéphane et son équipe ont mis en place un débat mobile, avec la volonté de mettre en récit le territoire en faisant jouer l’imaginaire collectif : les résultats mettent notamment en lumière le fait que Grande-Synthe reste un territoire « naturellement industriel » dans l’esprit de ses acteurs.
Dominique Bourg, philosophe de l’Université de Lausanne, grand témoin de cette plénière, a souligné le fait que la transition prend un sens tout à fait particulier dans le fleuron de l’industrie carbonée. Si le monde d’hier se basait sur un seul indicateur, le PIB, pour mesurer le bien-être, aujourd’hui ce lien n’est plus d’actualité. La consommation de ressources à travers le monde croît plus vite que le PIB, dans une économie concentrant de plus en plus les richesses : la nécessité de revoir notre conception du développement est plus forte que jamais.
#2 Table-ronde : Des principes aux actes ! Regards croisés sur les orientations et les outils pour accompagner une transition économique, écologique et sociale à l’échelle des territoires et des organisations.
Nathalie Libbrecht est chargée de mission au Commissariat spécial à la revitalisation et à la ré-industrialisation des Hauts de France. Elle a présenté l’objectif et les actions de ce Commissariat, qui œuvre à détecter des projets ayant le potentiel de revitaliser le territoire, et d’aider à leur accélération.
Michel Angers est maire de Shawinigan au Québec, une ville industrielle très riche durant la première moitié du XXème siècle qui a connu de grosses difficultés économiques dans les années soixante. Un Comité de diversification économique a vu le jour, avec pour objectif la reconversion de l’économie à travers 4 cibles de diversification : numérique, technologies vertes, électronique, transformation métaux Aujourd’hui, c’est une ville très dynamique avec 12,5% de propriétaires d’entreprise chez les 18-34 ans contre 4% pour la moyenne du Québec.
Pour Damien Carême, il faut s’inspirer de l’exemple de Shawinigan et anticiper les chocs industriels. Il est compliqué pour un jeune d’aujourd’hui de se lancer dans l’entreprenariat, notamment à cause des lois interdisant aux collectivités de financer des prototypes. La nécessité d’un droit à l’innovation se fait de plus en plus pressante.
Christian du Tertre, économiste et directeur scientifique d’ATEMIS et grand témoin de cette table-ronde a souligné qu’au-delà des crises, il est important de regarder les mutations que traversent nos sociétés, car « la crise a des sources plus complexes que son expression ». Il a notamment alerté sur les nouvelles start-up entièrement financiarisées, à l’image de Blablacar.
#3 Plénière : Expérimentations et travaux prospectifs d’ailleurs : Enseignements et perspectives pour renforcer une transition économique, écologique et sociale de notre territoire.
Une plénière un peu plus technique où Valérie Vincent, chef du service Economie et Prospective de l’ADEME, a présenté l’évaluation macro-économique des visions énergétiques 2030-2050 et l’élaboration d’un scénario 100% énergie renouvelable d’ici 2050 en France, en évoquant les impacts sur les branches énergétiques clés du Dunkerquois. L’évaluation est téléchargeable ici.
Alain Mestre, du cabinet Syndex, a présenté l’étude prospective « Compétences-Emplois-Climat Ile de France », qui pour objectif d’étudier l’impact en termes d’emplois et de compétences des politiques et des mesures d’adaptation et d’atténuation du changement climatique en IDF. La synthèse de l’étude est téléchargeable ici.
Boris Chabanel, expert associé du cabinet Utopies, s’est exprimé sur le développement des territoires par le circuit économique local: Comment agir sur l’ancrage et la circulation des richesses ? Substituer une partie des importations par une production locale est un enjeu majeur. Il est également important de prendre en compte l’interdépendance entre secteurs. De plus, parler de circuit économique local implique de mieux comprendre la demande locale.
Claude Lenglet, de TIR Consulting Group, a présenté la « Feuille de route pour une nouvelle économie » de la Métro-Région Rotterdam-La-Haye : vision pour une stratégie globale de transition d’un territoire ». Les chemins vers la transition identifiés : faire d’un port marqué par les énergies fossiles le premier port numérique d’Europe, créer un delta des énergies renouvelables, et opérer dans une logique d’économie circulaire.
Pierre Veltz, ingénieur-sociologue et grand témoin de cette plénière, a souligné entre autres la grande diversité de solutions selon les territoires (mix énergétique), le potentiel de l’économie dite du partage, dont les formes organisationnelles sont en décalages avec celles issues du siècle dernier, ainsi que l’importance croissante des facteurs relationnels dans notre économie moderne malgré la technicisation.
#4 Table-ronde : réactions et propositions de notre panel de participants
De nombreux acteurs du territoire de domaines très variés (syndicats, énergie, service…) ont pu exprimer leur point de vue sur ce qui fut dit dans la journée, et faire part de leurs réflexions sur la transition du Dunkerquois.
©Olivier Sampson
L’équipe de Green Cross tient à féliciter les organisateurs de ce forum qui s’est déroulé avec succès, et se réjouit d’avance de la prochaine édition du Forum de la Transition!
Pour télécharger le programme complet
Pour découvrir Grande-Synthe, ville durable