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RAPPORT SUR LES GAZ DE SCHISTE réalisé par Green Cross France et Territoires[/important]
Trois mois que nous le disons…ce pourrait être une bonne idée, mais elle est fausse. Voici pourquoi.
« Le gaz de schiste permet à la France d’avoir une nouvelle source d’énergie qui se substitue aux autres hydrocarbures fossiles et inscrit donc la France dans la transition énergétique ».
FAUX : L’exploitation des gaz de schiste s’inscrit dans une logique de court terme et vise à développer une nouvelle source d’hydrocarbure au détriment des énergies renouvelables.
L’extraction des gaz de schiste demande des investissements importants en infrastructures et en énergie. Le seul type d’exploitation qui pourrait se concevoir dans une logique d’intégration sereine au territoire est celui qui serait sur le temps long (20 ans minimum). Ce qui semble une rare exception dans l’exploitation des gaz de schiste. Si l’exploitation est de court terme, comme c’est souvent le cas, cela relève d’un gaspillage pur et simple d’argent public : les exploitants se déplacent sur d’autres territoires mais les impacts environnementaux, eux, restent.
De plus, le développement de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables, est ralenti par les promesses répétées d’une énergie peu chère dans un futur proche. Ce qui retarde d’autant l’entrée de la France dans une transition énergétique alors que d’autres pays sont en passe de réussir.
Le temps est à un engagement concret, démontré et affirmé vers la transition énergétique. Pour éviter de se perdre une nouvelle fois en conjoncture, nous proposons des éléments de réponse et d’analyse à d’autres fausses bonnes idées qui surgissent régulièrement dans le débat.
Idée 1 : « L’exploitation de gaz de schiste permet de faire baisser les prix du gaz sur les marchés spot et de faire pression sur les contrats long terme, comme aux États-Unis » – Le développement de l’exploitation de gaz de schiste aux Etats-Unis permet aujourd’hui une forte diminution des prix spot du gaz sur le marché américain : environ 7$/MWh, soit 3 à 4 fois moins cher qu’en Europe.
FAUX : Aux Etats-Unis, le bas prix du gaz est dû en fait à la bulle spéculative gazière en formation
Idée 2 : « L’exploitation des gaz de schiste permettrait à la France de réduire significativement ses importations de gaz » – Pour augmenter l’indépendance énergétique de la France, il faudrait produire plus d’énergie à partir des ressources du territoire et diminuer les importations de combustibles fossiles. Produire des gaz de schiste sur le territoire français permettrait-il de réduire les importations de gaz naturel de la France et donc son déficit de commerce extérieur ?
FAUX : En gardant en tête des ordres de grandeur : La France contiendrait 5000 milliards de m3 de gaz de schiste. En supposant un taux de récupération d’environ 10%, on estime à plusieurs centaines de milliers de puits à creuser pour produire les 500 milliards de m3, qui représente moins de 15 ans de consommation française. Cela supposerait plus d’une dizaine de puits au km² (la moyenne aux Etats Unis est de 3 puits/km²). De plus, ne seraient exploitées que les parties économiquement rentables, ce qui diminue grandement la part des réserves véritables.
La production de gaz de schiste serait loin de pouvoir permettre la réduction des importations en gaz de façon significative sur une longue durée.
Idée 3 : « L’exploitation des gaz de schiste est créatrice d’emplois locaux »
FAUX : La création d’emplois par puits est très faible. En effet, c’est pendant la phase d’exploration de l’utilisation de main d’œuvre est la plus importante (32.3 emplois directs ou indirects /puits sur 6 ans)[1]. Pendant la phase d’exploitation, l’emploi de main d’œuvre se réduit à 0.3 emplois directs ou indirects /puits pour les 6 premières années de production puis 0.2 emplois directs / puits pour les 10 années suivantes.
Idée 4 : « Le gaz de schiste est présent en quantité importante en Europe de manière certaine»
FAUX : Il convient d’être très prudent avec les estimations qui ont été faites sur les réserves supposées en gaz de schiste des pays européens. Les estimations de l’AIE (les seules chiffrées aujourd’hui par pays) reposent sur des extrapolations de données de teneur en hydrocarbures issues de quelques sondages à l’ensemble de la superficie des bassins supposés. Les estimations de l’Agence Internationale de l’Energie, régulièrement revues à la baisse (France, Norvège, Pologne) sont très optimistes (et supposent un taux de récupération de 40% à un prix entre 2.7 et 9$/MMBTU)[1]. On peut citer l‘exemple de la Pologne qui a lancé une étude pour estimer les ressources en gaz de schiste et dont les résultats donnent des réserves décevantes, dix fois inférieures[3] aux estimations optimistes de l’AIE. Le gisement peut donc être largement surestimé.
Idée 5 : « Le gaz de schiste est un combustible fossile plus vert que les autres hydrocarbures» – Un des arguments majeurs pour l’exploitation des gaz de schiste est que le gaz naturel est une énergie « verte ». Lors de la combustion, le gaz naturel génèrerait moins de GES que le charbon ou le pétrole[1].
FAUX : Une analyse du cycle de vie rigoureuse « du puits à la roue » du gaz de schiste, prenant en compte la production (forage, fracturation hydraulique, fuites de gaz lors de l’extraction et du transport du gaz) doit seule établir si oui ou non le gaz de schiste est moins polluant que les autres hydrocarbures fossiles.
Nous pensons que l’exploitation des gaz de schiste sera plus nocive en termes d’empreinte climatique que celle du charbon. De nombreuses études sont en cours sur les taux de fuites à proximité des puits. Toutes les études récentes remettent en cause l’idée couramment répandue selon laquelle les gaz de schiste auraient un bilan carbone plus avantageux que ceux des autres hydrocarbures.
Idée 6 : « Il est possible de garantir une étanchéité parfaite à un puits »
FAUX : Il n’est déjà pas possible de garantir l’intégrité de puits conventionnels « classiques ».
En effet, un document interne de Schlumberger ci-dessous sur 15 000 puits montre des fuites dès la première sur 5% des puits neufs, 30 à 40% des puits vieux de 10 ans, et 50% des puits dépassant 15 ans.
Figure 28- Pourcentage de puits avec des fuites incontrôlées – Sur 15 000 puits, données Schlumberger et US Mineral Management Service[1]
S’il est impossible de contrôler sur la durée l’étanchéité d’un puits vertical, alors comment garantir le 100% étanche sur la durée pour un forage horizontal, alors même que le cimentage de puits est fragilisé par l’injection de produits chimiques à haute pression, et par la présence de mini-séismes.
Nicolas Imbert, directeur exécutif de Green Cross France et Territoires